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Chaleur estivale avant un gel dramatique : une situation déjà vue en avril 1991

Après les records de chaleur de la fin mars 2021, la France subit depuis le 6 avril de nombreuses gelées aux conséquences dramatiques pour les cultures. Une situation très similaire avait été observée en avril 1991 avec une ambiance estivale suivie par un gel dommageable.

 

Un gel printanier 2021 catastrophique

 

Records mensuels de chaleur du mercredi 31 mars 2021 - Météo Villes

 

Avant de subir des records de froid du 6 au 8 avril, la France avait connu une fin mars remarquablement chaude et estivale ! Les 30 et 31 mars, le thermomètre était monté jusqu'à 24 à 27°C dans le nord-est de la France, faisant tomber de nombreux records de chaleur ! On mesurait 25,9°C à Saint-Yan, 26°C à Lyon, 26,1°C à Troyes ou encore 27,3°C à Colmar, régions où les vignobles sont nombreux.

 

Masse d'air à 850 hPa (vers 1500m) à échelle continentale le 7 avril 2021 - via wetterzentrale

 

Moins d'une semaine plus tard, une remarquable coulée d'air polaire envahissait la France, résultant de nombreux records de froid entre le 6 et le 8 avril 2021. Les températures s'abaissaient entre -6 et -10°C à 850 hPa (vers 1500m), des niveaux excessivement bas pour un mois d'avril et dont la période de retour est d'environ 30 ans !

 

Neige et gel dans les vignes d'Arbois dans le Jura le 7 avril 2021 - photo Pascal Regaldi

 

La coulée d'air froid fut si importante qu'elle a entraîné de fréquentes averses de neige en plaine sur le nord et l'est de la France, jusque dans certaines régions centrales. Des vignobles se sont retrouvés sous la neige en matinée du 7 avril 2021, comme l'illustre la photo ci-dessus dans le Jura, seulement quelques jours après avoir connu des chaleurs précoces et estivales...

 

Records de froid relevés durant la période du 5 au 8 avril 2021 - Météo Villes 

 

Au sol, plus de 100 records de froid pour un mois d'avril ont été battus lors de cette coulée d'air polaire, particulièrement entre les 6 et 8 avril 2021. En dehors des villes, on a relevé -5,5°C dans les terres de l'Hérault, -5,6°C dans les Landes, -5,8°C dans la Nièvre, -6,2°C en Charente, -6,4°C dans l'Essonne et la Drôme, -6,9°C dans l'Oise et jusqu'à -8°C en Eure-et-Loir ! Nous avons assisté à de véritables nuits d'hiver avec des températures passant sous le zéro dès la première partie de nuit et le restant durant de longues heures.

 

Dégâts du gel sur les vignes du Minervois dans l'Aude le 8 avril 2021 - photo Alexandre Grellier / France 3

 

Les dégâts sur les vignes sont majeurs. Les bourgeons, encore jeunes, sont particulièrement vulnérables aux basses températures et les nuits très froides - donnant des températures parfois largement négatives durant de longues heures - ont eu des conséquences dramatiques dans les vignes, du nord-est jusqu'à l'arrière-pays méditerranéen et au sud-ouest.

 

Les vignes ne sont pas les seules concernées. Toutes les cultures de fruitiers ont été fortement touchées, dont pommiers, pêchers et abricotiers mais aussi les betteraves dans le nord du pays. Les pertes sont variables selon les secteurs mais souvent très conséquentes, atteignant 80 à 100% sur certaines parcelles ! Le gel dommageable a notamment touché la vallée du Rhône, région très productrice de fruits. Le gouvernement français a qualifié ce gel printanier 2021 de "plus grande catastrophe agronomique du siècle".

 

 

Avril 1991 : de grosses similitudes

 

Masse d'air à 850 hPa (vers 1500m) et températures au sol le 12 avril 1991 - via wetterzentrale

 

En 1991, le premier véritable coup de chaud était intervenu une douzaine de jours plus tard que cette année. Les 11 et 12 avril 1991 furent quasiment estivaux en France avec une masse d'air venue du nord de l'Afrique en flux de sud. Au sol, les températures grimpaient entre 24 et 26°C sur une grande partie du territoire. On approchait les 25°C jusqu'en bordure de la Mer du Nord ! Ces températures estivales avaient contribué à accélérer l'éveil de la végétation.

 

Masse d'air à 850 hPa (vers 1500m) à échelle continentale le 20 avril 1991 - via wetterzentrale

 

À peine plus d'une semaine plus tard, une impressionnante coulée d'air polaire plongeait sur notre pays. Les températures de la masse d'air étaient alors très similaires à celles que nous avons observées du 6 au 8 avril 2021. On notait des valeurs de -6 à -8°C à 850 hPa (vers 1500m) du sud au nord de la France du 20 au 22 avril 2021. Les similarités avec la situation 2021 sont impressionnantes, même si les faits s'étaient produits 12 jours plus tard dans la saison.

 

Chutes de neige en Seine-et-Marne et à Bastia les 20 et 21 avril 1991 - Météo Villes

 

Comme cette année, cette coulée polaire s'était accompagnée d'un peu d'humidité résultant de précipitations neigeuses jusqu'en plaine. Le 20 avril 1991, le nord-est de la France subit de fréquentes averses de neige et la circulation est même fortement perturbée en Seine-et-Marne où plusieurs centimètres s'accumulent. Comme le froid plonge jusqu'en Méditerranée, des giboulées se déclenchent jusqu'en Corse comme à Bastia où le grésil et la neige roulée blanchissent les sols le 21 avril 1991 !

 

Températures minimales des 21 et 22 avril 1991 - archives Météo France

 

C'est après le passage des nuages et de l'instabilité que surviennent les gelées les plus fortes, durant les nuits du 21 et du 22 avril 1991. Les températures descendent alors entre 0 et -5°C sur une grande partie des régions françaises mais certaines régions voient le thermomètre s'abaisser à des niveaux records. On mesure -6°C à Nancy, -8°C à Charleville-Mézières et même localement jusqu'à -11°C en plaine de Limagne en Auvergne !

 

On note toutefois que les nuages étaient restés plus fréquents sur le quart sud-est de la France, permettant aux températures de se maintenir à des niveaux moins froids en vallée du Rhône. Il s'agit de la principale différence avec l'épisode d'avril 2021.

 

Vignes totalement brûlées par le gel en avril 1991 - archives de l'INA

 

Alors que les vignes bourgeonnent et que de nombreux autres fruitiers fleurissent, ce coup de gel marqué cause des ravages dans les cultures. Viticulteurs et arboriculteurs constatent des pertes colossales du sud-ouest jusqu'au nord-est de la France et les prix des fruits augmentent à l'été 1991.

 

On estime qu'environ 90% de la France a été exposé à un gel potentiellement dommageable du 20 au 22 avril 1991. Pour l'épisode de 2021, le chiffre est proche de 98% ! Comme évoqué plus haut, la vallée du Rhône et ses importantes cultures fruitières avaient été en grande partie épargnées en 1991, ce qui n'est pas le cas cette année...

 

 

Liste (non-exhaustive) des épisodes de gel printanier dommageable :

 

  • Avril 2021 : environ 98% du pays exposé 
  • 1er et 2 avril 2020 : environ 65% du pays exposé
  • 6 mai 2019 : environ 50% du pays exposé
  • 20 au 29 avril 2017 : environ 85% du pays exposé
  • 17 avril 2012 : environ 65% du pays exposé
  • 8 au 11 avril 2003 : environ 75% du pays exposé
  • 21 au 24 avril 1997 : environ 80% du pays exposé
  • 20 au 22 avril 1991 : environ 90% du pays exposé
  • 5 au 7 mai 1979 : environ 50% du pays exposé
  • 6 et 7 mai 1957 : environ 50% du pays exposé
  • 1er au 3 mai 1945 : environ 70% du pays exposé

 

 

Vous pouvez consulter le thread twitter de Serge Zaka pour plus d'informations sur les épisodes marquants de gel printanier en France ou vous référer à notre chronique du temps passé.

 

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Photo de Guillaume SECHETHistoire du site Météo Geneve

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